mercredi 18 janvier 2017

Escarmouche impériale

Salut à toi, compañero figuriniste !
Tout d'abord, comme c'est la coutume, je te souhaite de passer une bonne grosse année ludique en 2017 !
On continue avec le rayon coutume et le skud musico-métallique ! Et comme on va cause empire aujourd'hui...

 

Bon, je suis toujours en rade d'appareil photo. Donc, aujourd'hui c'est un billet chronique et nous allons plus particulièrement nous pencher sur Chosen Men, military skirmish games in the napoleonics wars, numéro 18 de la série Osprey Wargames, sorti en fin d'année dernière et arrivé récemment dans mon antre.

La couverture du livre, illustration de Mark Stacey


En général, lorsqu’un joueur de jeux de stratégie avec figurines prononce le nom « Napoléon », son interlocuteur peut réagir de deux manières diamétralement opposées… il risque de s’écrouler et convulser nerveusement, tout en bavant, des images d’épaulières peintes de la mauvaise couleur, d’énormes traités d’uniformologie, de masses de figurines à peindre et d’orthodoxie historique défilant dans son cerveau ludique… ou alors, il va se lancer dans une discussion sans fin sur les choix tactiques de la bataille de Solférino, des mérites respectifs de l’artillerie et de la cavalerie et de la couleur des chaussettes de Murat à Wagram...
Bref, la période napoélonienne traîne avec elle dans notre milieu comme qui dirait une (sale ?) réputation auprès des joueurs que nous qualifierons de "non-historiques". Et pourtant, les règles historiques sur cette période se multiplient car elle est la plus porteuse pour les joueurs "histo", et ce des deux côtés de la Manche. Mais, le plus souvent, ces règles proposent de reconstituer de grandes batailles (souvent en 15 mm ou 6 mm) en alignant beaucoup beaucoup beaucoup de figurines... et parfois plus... souvent à l'échelle de la compagnie voire du bataillon. Ainsi, une figurine équivaut souvent à des dizaines voire des centaines de soldats "dans la réalité".
Les règles d'escarmouche sont elles plus rares. Chosen Men fait partie de cette catégorie. Dans la règle, chaque figurine correspond à un seul cavalier ou un seul fantassin.

Les troupes anglaises à Quatre-Bras, lors de la bataille de Waterloo (1815) - Tableau de Lady Butler

Comme d'hab' chez Osprey Publishing, la règle, rédigée par Mark Latham (un ancien de chez GW), se présente sur un "petit" livret d'une soixantaine de pages agrémenté de photos de figurines en action au milieu de très beaux décors et d'illustrations issues de l'énorme banque de données de l'éditeur.
Durant une partie, chaque joueur contrôle quelques unités, environ une demi-douzaine pour un affrontement standard de 500 points. Les unités se répartissent entre fantassins (de 5 à 20 figurines), cavaliers (de 5 à 10 figurines), artillerie (1 canon et ses servants) et officiers (de 1 à 4 figurines, les officiers supérieurs pouvant être accompagnés par des Aides de camp). Chaque unité est menée par un Leader autour duquel elle est organisée. Elle a aussi un coût et accès à diverses options qui peuvent l'augmenter, nous y reviendrons.
Chaque figurine est soclée individuellement et se définit par six caractéristiques :
- Mêlée (M) : la capacité de combat au corps-à-corps.
- Résilience (R) : la force et la constitution.
- Commandement (C) : la discipline, le courage et la capacité de diriger.
- Blessures : le nombre de blessures que peut recevoir une figurine avant de mourir.
- Tactique (T) : la qualité de la troupe qui donne le nombre d'actions qu'elle peut effectuer durant un tour.
- Stratégie (S) : Cette caractéristique n'est possédée que par les officiers. Chacun possède un certain nombre de points en début de partie pour effectuer des actions spéciales, donner des ordres...
Prenons un exemple concret ! Une unité de 5 fantassins légers français commandée par un sergent a un niveau de mêlée de 3, une résilience de 3, un commandement de 3, un niveau tactique de 3, une blessure de 1 et un niveau de stratégie de 1.

Napoléon à Borodino - Tableau de Vasiliy Vasilyevich Vereshagin

Le corps des règles en lui-même couvre une trentaine de pages. Le système est relativement basique. Le tour se décompose entre la phase d'initiative, phase d'action, phase de mêlée et phase de récupération.

Phase d'initiative : En début de partie, un des deux joueurs prend la main. On lance un D6 et on ajoute la plus haute valeur de Stratégie de l'armée. Le score plus élevée choisit de prendre ou de laisser la main.

Phase d'action : Le joueur ayant la main active l'une de ses unités et lui fait effectuer une ou plusieurs actions : mouvement, double mouvement (seulement pour les unités de harcèlement), charger, changer de formation, se mettre à couvert (seulement pour les unités de harcèlement), se désengager, tenir la position, donner un ordre (pour les Leaders d'unité), mettre en attente (permet de faire agir une unité plus tard pour l'armée en sous-nombre), tirer. Seule restriction, une unité ne peut pas effectuer deux fois la même action dans le même tour. Suivant l'action effectuée, elle coûte de 0 à 2 TAC (en général). Par exemple, si une unité tire, cela représente 1 TAC. Si elle charge, le coût est de deux TAC. Donc, si l'on reprend notre unité de 5 fantassins légers français, ils pourront, par exemple, se déplacer (1 TAC) puis charger (2 TAC). Lorsque le premier joueur a activé une unité, c'est au tour de son adversaire d'en sélectionner une et de la faire agir. Et ainsi de suite jusqu'à ceux que l'ensemble des unités effectue leurs actions.
Rien de révolutionnaire non plus dans le système de combat. Quand une unité tire ou charge, elle choisit une cible puis on lance un nombre de D6 équivalent au nombre de soldats présents dans l’unité. Il y a un seuil à atteindre (4+, 5+…) pour toucher, seuil qui varie selon l’arme utilisée (au tir) ou les valeur de mêlée des unités concernées par le corps-à-corps et d’éventuels modificateurs tactiques (un couvert par exemple). On conserve les dés qui ont permis de faire des touches et le défenseur effectue des sauvegardes en utilisant son niveau de Résilience. Chaque échec correspond à une blessure. On retire ensuite les pertes et l’unité visée peut être amenée à tester son moral.

Phase de mêlée : C'est au cours de cette phase que l'on résout les combats au corps-à-corps avec les unités engagées lors de la phase d'action.

Phase de récupération : Les unités démoralisées tentent de se rallier, on vérifie les conditions de victoire du scénario...


La reddition de la ville d'Ulm - Tableau de Thévenin

La suite du livret est consacrée aux officiers dont l’impact dans le jeu n’est pas négligeable. La volonté de l’auteur est de retranscrire l’importance du commandement dans les guerres napoléoniennes. Pour cela, les joueurs peuvent donc aligner des officiers et des Aides de camp. Chaque officier peut sélectionner des « effets tactiques » qu’il utilisera durant la bataille. Chacun de ses effets a un coût en points lors de la constitution de la liste d’armée. Le joueur devra ensuite, au cours de la partie, dépenser un point de Stratégie pour utiliser cette compétence. La plupart des officiers possèdent trois points de stratégie. Concrètement, un officier pourra donc utiliser soit trois fois le même effet s’il n’en a acheté qu’un soit une fois chaque effet s’il en a acheté trois plus… Cet officier possède aussi un Trait comme chanceux ou assoiffé de sang qui permet d'encore plus le personnaliser. Les Aides de camp peuvent être un, deux ou trois et ils forment une unité indépendante avec l’officier. Ce système permet de personnaliser votre armée et votre façon de jouer d’une manière que je trouve assez élégante car laissant de très larges possibilités.
Le bouquin se poursuit avec la procédure pour gérer l'artillerie, les unités spéciales comme les sapeurs et certaines règles d'unité (comme les "charges dévastatrices" de la cavalerie), le tout en six pages !

Image tirée du livre de règles
Viennent ensuite les listes d’armées. Elles tournent autour de deux grands « théâtres  d’opération », la péninsule ibérique et la campagne des Cent jours qui conduit à la bataille de Waterloo, ainsi qu’autour de trois des grandes puissances de l’époque, la Grande-Bretagne et ses alliés (Espagnols, Portugais, Brunswick, Belges et Hollandais), la France et ses alliés (Polonais, Allemands, Suisses et Nassau) et Prusse. Les Russes et les Autrichiens sont les grands absents de ces listes ! Espérons qu'Osprey ai le bon goût de publier un supplément ou de diffuser gratuitement ces listes en téléchargement...

Pour se constituer une force, on fixe un total allant de 150 à 500 points. Le jeu est prévu pour de grosses escarmouches d’environ 500 points où quelques escouades vont s’affronter. Cela dit, l’auteur assure qu’une très grosse partie (jusqu’à 1500 points) est envisageable à condition d’avoir assez de temps et de bière…
Une fois le total de points fixé par le scénario (ou d’un commun accord entre joueurs), on sélectionne ses unités. Sans surprise, plus l’unité est efficace et expérimentée, plus elle est chère. On peut ensuite y ajouter des options comme des hommes / cavaliers supplémentaires, un tambour / trompette, un porte-drapeau ou améliorer le leader (un sergent obtient le grade de capitaine) etc. ce qui augmente évidemment l’impact de votre unité mais aussi son coût. Pour vous donner un ordre d’idée, une unité de 5 fantassins expérimentés va vous coûter entre 80 et 100 points environ selon les options. Une bonne unité de cavalerie (hussards ou cuirassiers) va taper dans les 120 à 150 points… Bref, vos 500 points vont fondre comme neige au soleil !
Exemple ? Notre unité de 5 fantassins légers français est de retour ! Elle coûte, de base, 45 points et est équipée de mousquets et de baïonnettes. On peut rajouter jusqu'à 5 hommes à l'escouade pour 5 points par troufion. Un tambour ? Trois points de plus ! Un porte-bannière ? Paie tes huit points. Le sergent est élevé au rang de capitaine ? Hop, encore huit points ! Vous voulez faire de vos simples soldats des Carabiniers ? Oui, deux points de plus par soldat. Des Voltigeurs ? Ce sera trois points par membre de l'escouade. Donc, si j'aligne 8 Voltigeurs dont un tambour, menés par un Capitaine, il m'en coûtera 92 points.

Au final, vous allez vous retrouver avec, en général, un Officier, deux ou trois unités de fantassins, une de cavalerie et peut-être un canon (à moins que vous ne souhaitiez aligner soit une « armée » d’élite ou au contraire une armée populeuse). Ainsi, même si chaque unité peut avoir une ou deux règles optionnelles/spéciales et les Officiers apporter un peu plus de complexité, avec seulement une demi-douzaine d’unités sous vos ordres, on comprend que le jeu ne sera pas trop complexe et relativement rapide.

Wellington à Waterloo - Tableau de Robert A. Hillingford

On trouve dans le reste du livret les règles de gestion des décors et la présentation de quelques scénarios relativement génériques.

Alors, sentiment final après la lecture du bouquin ? Je ne suis pas, à la base, un grand admirateur du petit empereur corse. Mais il faut reconnaître que la période est intéressante et que les possibilité de jeu très nombreuses. Le côté "grande bataille" de beaucoup de règles me rebute. Là, on a une règle simple mais pas simpliste, qui semble posséder assez de "chrome" comme on dit (c'est-à-dire immersive) notamment avec le rôle des officiers et pas trop gourmande en figurines. D'autant que l'offre pour la période est pour le moins pléthorique.
Bref, ça donne envie de tester et jouer... voyez plutôt.






C'est tout (et c'est déjà pas mal !) pour aujourd'hui !
Hasta siempre, Compañeros !

11 commentaires:

  1. personellement, le napo ça m'évoque surtout un manque de fantaisie mais je dois bien avoué que depuis quelques années, je ne rechignerais pas à m'y essayer si c'est pas trop chronophage. En l'occurence cette règle à l'air sympa! Niveau décors c'est censé être dense ou une ferme, un arbre et une haie et c'est plié?
    Merci pour la review!

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  2. MErci pour le com', Holi.
    C'est vrai que je n'ai pas précisé la taille de la table et le nombre de décors. En gros, on joue sur une table de 90cm/90cm pour un format jusqu'à 350 points ou du 120cm/120cm pour un format de 500 points environ (voire du 90/120 comme à SAGA).
    Pour les décors, comme c'est un jeu d'escarmouche, il en faut quand même quelques-uns pour assurer les couverts et ne pas laisser un boulevard à la cavalerie. Comme le précise l'auteur, c'est une question de goût et on peut tout à fait imaginer une table surchargée représentant un village espagnol et la campagne alentour.

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  3. Remarquable article consacré à du Napoléonien made in Osprey ^^

    Pour ma part, cette période ne m'attire pas du tout (j'en ai vraiment soupé des systèmes de jeux avec des armées qui dégueulent de figs partout car d'abord il faut peindre tout ça). Les uniformes sont magnifiques mais respecter le code de couleur relève souvent d'une rigueur toute monacale ^^'

    Mais c'est pas mal que Osprey tente de vulgariser un peu le truc avec un système de jeu à taille "humaine" en effectifs de figs ^^

    Pour ma part, j'attends Rogue Stars et tu feras bien une partie avec moi ^^

    Serviteur,

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  4. Merci Morikun !
    C'est vrai que la volonté de jouer à "échelle humaine" est louable. Pour les joueurs, en temps de peinture, de jeu et en argent, c'est moins contraignant.
    Par exemple, pour 40 livres (soit 45/46 euros) chez les frères Perry, tu as 40 fantassins et 14 cavaliers français ne. Ce qui est suffisant pour débuter et pour deux joueurs ! Après faut en trouver deux autres pour faire les Anglais !

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    1. Bien essayé avec ton exemple mais définitivement non : l'historique me parle peu en général et Napoléon encore moins ^^

      Et suprême argument qui fait que je ne jouerai pas : "Dans la période napoléonienne, y a pas de japonais alors c'est nul" XD

      Serviteur,

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    2. Et oui, je sais bien que toi, l'histo, ça te laisse de marbre (ah ah...).
      Mais bon, si j'y joue, c'est pas de suite ! Il faut que je finisse d'autres projets avant.

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  5. Pour avoir joué aux Aigles avec mon père et ses amis en 3v3, c'était pas le même délire.
    J'aimerai bien l'avoir entre les mains celui là.
    Merci pour la découverte !

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    1. Je connais pas l'âge de ton paternel, mais le mien qui n'en a pas grand-chose à faire des pitoux a, pour la première fois, pris le bouquin qui traînait à la maison, l'a feuilleté et m'a posé des questions. Bon, il jouera pas, hein, mais Napoléon, l'Empire, Iéna, Austerlitz etc... j'ai l'impression que ça cause vachement aux "anciens" :-D

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    2. Il a une petite cinquantaine, et c'est pas des figurines Napoléoniennes qu'il a commencé (54mm avant de passer sur plus petit). Avant Bloodbowl et autres consorts fantastiques ;)

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  6. Je me pose quand même la question : mis à part pour les combats de guérilla en Espagne, j'avoue qu'avec aussi peu de figurines , je ne vois pas comment on peut envisager les attaques en colonnes, les formations en carré etc
    Sinon à envisager comme un combat de patrouille , mais là aussi des officiers supérieurs qui commandent à 10 ou 15 figs , ça me laisse dubitatif.
    Mais bon pour ressortir les 1/72 pourquoi pas .

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  7. Les formations sont intégrées à la règle de façon relativement simple. Par exemple, une unité en colonne peut avancer plus vite.
    Après, effectivement, il faut voir le jeu plus comme une "préparation" ou une partie d'une bataille plus large genre un combat d'avant-garde ou la prise d'un objo (un pont...).
    Concernant les gradés, au sein d'une unité, les gradés les plus élevés sont les capitaines, pour les officiers supérieurs, on dépasse pas le grade de colonel. Alors, oui, c'est surprenant pour "gérer" une vingtaine/trentaine de figs mais bon, certains gradés vont aussi au charbon.
    Enfin (ouf !) le jeu ne se veut pas parfaitement historique. Il privilégie l'aspect ludique.

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